samedi 7 février 2015

De l'EFFET PAPILLON... en bibliothèque de phoète (1)

Photo Jean-Phi
 
Avertissement - on pourra trouver ce billet outrageusement égocentrique, soit. Mais il s'agit, à mon sens, de Révolution culturelle des mœurs, à inventer et appliquer d'abord à soi-même...
Rém*

Depuis sept décennies que j'ai boulimie de lire, puis d'écrire, mais aussi, avant St-Nazaire, de bouger, je me suis constitué bien des bibliothèques (dont l'une fut bradée à un brocanteur pour survivre !...). Rarement rangées, elles sont pleines de courants d'air : entrées et sorties aléatoires...
Les premières furent banales petites collections enfantines pleines d'images pieuses, dont Tarzan, Mowgli, Peter Pan ou Blanche-Neige, passons... Mais il me souvient qu'il y a quelques années encore, j'avais toujours, quelque part dans mes archives, « mon vrai premier livre ». Sous grand format (25x40cm?) et belle couverture cartonnée, cela s'appelait « Le Rayon Vert » et c'était le récit du gamin Jean-François, seul sur une plage à l'heure fatale où le soleil disparaît à l'horizon en émettant son tout dernier rayon, vert, qu'il faut oser croire pour pouvoir le voir... Et le jeune héros l'ayant bien sûr vu – comme moi qui ne voit que moche écran pâle face à moi ! – se trouvait embarqué sur un quatre-mâts magnifique, naviguait au travers des tempêtes comme autour d'îles paradisiaques où débarquer de plage en plage voir, voir, voir... Jusqu'à la plage initiale où débarquer à nouveau, se réveiller, seul, mais habité d'un rêve plein d'aventures, d'audacieux marins, de gentils îliens dont la si belle Vahia qui lui donna de sa coiffure une grande fleur rouge en forme de papillon.
Il en a une aile-pétale, toujours en main à son soudain réveil dans le frais crépuscule !..
Avec le choix et les sous paternel, ce beau livre me fut donné vers mes six ans par ma sœur aînée je crois. Celle qui, après recherches, m'avait trouvé endormi sous l'ardent soleil d'Égypte, car oublié sur la plage. Mais elle ne m'offrit cela qu'après ma lente guérison du très gros « coup de bambou » que provoqua ce si dangereux sommeil au soleil – jours de grosse fièvre, délires, maux de tête...
Mais suis-je vraiment guéri ou ai-je attrapé là, à vie, le top-virus, le vert-rayon de la poésie ? Merci en tout cas du cadeau de ce livre de voyage poétique... parti peut-être aujourd'hui entre les mains d'un ou d'une gosse, œuvrier d'avenir lumineux !
Si je ne suis pas sûr d'avoir fidèlement résumé ce récit poétique, il me souvient bien de la qualité typographique du texte ainsi que des quelques illustrations pleine-page, du moins des beaux dessins de la tempête, de la belle Vahia... : C'était déjà de la « Phoésie », sans le mot-valise !
 

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Mon actuelle bibliothèque comporte un rayon de livres de tels grands formats, dont quelques très rares « beaux livres », presque tous d'occasion. Ils voisinent avec divers formats et ce sont des documents consacrés à des photographes, mais aussi à d'autres artistes, peintres, poètes, musiciens, théâtreux, etc. Lourd rayon d'environ un mètre linéaire. C'est peu par rapport aux 16m, environ, du reste de mes rayons de livres, auxquels rajouter environ 3m d'archives papier, 2 d'albums photo et au moins autant de vieilles revues ou coupures de presse, soit 24-26m linéaires au total... Je reviendrai plus loin sur le détail de ces 16-17m des seuls bouquins, mais j'ai à vous confier comment j'en suis venu à mesurer hier tout ça !
C'est en juin 2013, sur le sage conseil d'amis avisés, que, soudain, « je me repris en main » : arrêtant brusquement le lourd traitement médical qui me démoralisait sans me soigner. Je décidais de tout faire pour quelque part, créer une « toute dernière grande expo-photo rétrospective ». Accompagnée de la réédition de mon carnet de 32 photocartes « Sur Prises de Vue », qui fit aussi l'ouverture de mon site - l'actuel « Phoésie 3 ». Ce me fut « un gros coup d'jeune » !
Passons sur les détails rocambolesques... : Le fait est que c'est chez moi que s'ouvrit le 28 septembre 2013, à mes 75 ans, cette expo-photo. La quelle « révolutionna » d'abord mon modeste 2 pièces en fouillis. Il y a des années, j'avais récupéré sur le trottoir de grands panneaux de pub d'une parfumerie, pour ses versos blancs superbes. Le tout premier acte de créer mon expo fut d'accrocher ces versos de panneaux sur mes rayons de bibliothèque, ainsi rendue aveugle, inaccessible, tant pis... et tant mieux : cela doublait ma surface d'accrochage !! (pour les curieux de cette expo, voir photos et blablas sur mon site « Phoésie3 », en cliquant sur la rubrique à mon nom). Ces panneaux accrochés début septembre, je ne les décrochais que dix longues semaines plus tard, mi-novembre 2013. Ah, le choc de redécouvrir enfin mon trésor désordonné de livres ! Occasion de le ranger enfin, pour mieux « m'y retrouver » ?... Oui, mais, je le fis à peine : pas-l'temps !!... Car, revigoré par le succès (même, très modestement, pécunier!) de l'expo, je me lançais, 13 mois, à lire, relire ou acquérir tel ou tel ouvrage, envoyer mes « cailloux d'écriture » sur mon blog préféré, enrichir Phoésie 3... Puis, 4 mois plus tard, créer pendant 9 mois, un chantier d'écriture ! (mon toubib est épaté de ma santé... auto-améliorée sans ses soins, ou presque !!). Cette longue gestation d'écriture a accouché, à la « sacrée date » du 7 janvier dernier, de la souris nommée « Œuvrières &Œuvriers - essai », qui met en retard Phoésie 3, oui... Mais je m'y mets avec le prélude œuvrier que voici :
 
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Photo Jean-Phi
En quelques jours ardents, je viens de « re-révolutionner » toute ma bibliothèque, sous l'ambitieux signe Phoésie !... : de gauche à droite, cela commence par 4 larges étagères de mes si mouvants «albums-ou-boîtes-photo-perso », plus livres « photo-etc »... Tout contre, sont 4 étroits rayons d'une étagère consacrée à diverses anthologies de poèmes et à de minces brochures de poètes méconnus. Mais le 5° et plus haut rayon de cette étagère commence, avec Adonis et Apollinaire, le rangement alphabétique du « domaine poésie » (recueils de poèmes comme études sur l'auteur) qui envahit le haut du vaste rayonnage central de la pièce. Et, environ 5 mètres linéaires de rayonnage plus loin, voici Kateb Yacine qui clôt mon « domaine poésie ». Il me plaît que, par hasard, le Libanais Adonis et le Russo-polonais Apollinaire, qui ont inventé leurs noms, ouvrent ce rangement, cependant que l'Algérien Kateb Yacine a, par défi, gardé l'inversion bureaucratique française de son prénom kabyle Yacine et de son nom de famille Kateb – signifiant en arabe « lettré »... Il me plaît aussi que le poète anglais Lewis Carroll (et disciples ès-nonsens) s'étale en champion sur 15cm de rayonnage, cependant que l'une des traductions (j'en ai 4, 5 ou 6!) de « La Chasse au Snark » ne peut entrer là : c'est l'un de mes rares « beaux livres », donc rangé dans le profond rayon livres-photo-etc !...
D'autres auteurs prennent ici de la place : R.Queneau, A.Rimbaud, C.Roy, B.Cendrars, A.Chédid, L.Ferré, M.Darwich, H.Michaux, etc.. Mais il m'importe aussi de redécouvrir des Causssimon ou Mouloudji, Hardellet ou Gofette, Jouve ou Robin, Guillevic, Tardieu, Laâbi, Depestre, Péret ou etc., etc., bref d'ici « papillonner » en vaste et ardente poésie !

(à suivre...)


Sous l'casque d'Erby
 
 
 
 

11 commentaires:

  1. Bonjour caillardeuses et caillardeux. La littérature, la poésie, le plaisir de lire comme refuge, non pas pour fuir la réalité toute moche qu'on nous fourgue de force dans la coloquinte, mais comme alternative pour mettre de la couleur dans nos vies, pour bien garder à l'esprit que de l'autre côté des barrières factices la personne, dans sa différence, dans sa misère, dans sa douleur, dans son combat, dans ses rêves... est riche de cette émotion sublime qui nous fournit la matière avec laquelle cet autre monde que nous cherchons à bâtir existe, est là, à portée de lecture, dans la page qu'on tourne, dans celle qu'on écorne, dans les notes qu'on jette sur les marges, dans la rumeur des insomnies ou dans l'agitation d'une découverte qui nous porte vers la lumière...
    Merci à Rémi d'avoir mesuré les rayons de sa bibliothèque pour nous donner la mesure de ce que nous cherchons à être ou à devenir. La suite c'est pour demain, si vous êtes sages...

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    1. "La suite c'est pour demain, si vous êtes sages..." conclues-tu, en fin de solide premier commentaire, merci.
      De façon intemporelle, je crois qu'il est sage de penser "On a raison de se révolter", de refuser la servitude à son prochain, ne serait-ce que parce que nous naissons libres et égaux en droits, d'abord à la dignité.
      C'est dans l'action, multiforme, du quotidien social que l'on exerce cette sage maxime. ET C'EST DANS LA POÉSIE, pour ma part, que je me suis ressourcé le mieux : à m'ÉBLOUIR de l'humaine créativité et sensibilité humaine - quelque soit l'auteur et l'œuvre vraiment poétique, il y a ce chant à la dignité, cet appel fraternel émouvant à la liberté créatrice, cet hommage à la beauté du vol imprévisible du papillon...
      Au fait, je précise que, sur la seconde photo (merci Jean-Phi!), je montre une collection de papillons : vous en saurez plus demain, si vous êtes sages !!!

      @lediazec - peux-tu mettre (dans ou sous le texte) les liens prévus, sur Phoésie 3 et sur Œuvrières & Œuvriers ?

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    2. Liens en place. Je les avait pourtant mis hier soir, mais mon chalutier déconne ces temps-ci...

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    3. Il y a une erreur (d'anticipation sur la suite de demain...) : le 3° lie, renvoie à Le Clézio au lieu de ton billet sur mon essai!...

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    4. Réparé !!! Là ce n'est plus mon chalu qui a besoin de répa, mais ma cafetière !

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  2. Bonjour toutes et tous,

    Beau billet que voilà, on attend la suite évidemment. Ce billet fait du bien, pourquoi ? Parce qu' il met l'art et la littérature notamment au centre de nos existences, car c'est bien l'art et la littérature qui humanisent en premier lieu. A l'heure où des barbares, formatés par une voix unique, tuent sans pitié et brûlent des trésors de notre humanité (http://geopolis.francetvinfo.fr/daech-brule-2000-livres-et-manuscrits-datant-de-plus-de-7000-ans-52575), il me semble important de dire combien la littérature nous permet de rencontrer l'autre, de se décentrer, d'aiguiser nos consciences et notre esprit critique, d'ouvrir et de cultiver notre sensibilité, de s'élever vers la beauté plurielle du monde et de la vie...

    Hélas ! Si ailleurs on saccage la culture, en France et ailleurs en occident, on fait de même : les bibliothèques sont en voie d'extinction au profit de la consommation à outrance de biens bien inutiles parfois... Je côtoie beaucoup de jeunes bacheliers, de jeunes et moins jeunes adultes, et je me rends compte combien leur pensée est pauvre. Ils sont peu nombreux à s'intéresser à la poésie, à la littérature en général... Ils n'ont même plus les mots pour s'exprimer, pour exprimer leur individualité, pour incarner leur parole. Leur langue est pleine de lieux communs. Encore dernièrement, certains faisaient l'apologie de la peine de mort... C'est à peine s'ils trouvent intéressant le dernier documentaire de Marie-Monique Robin. Et combien vont lire ? Vraiment peu. Quant à écrire ? Ô que c'est difficile de se mettre en danger dans l'écriture !... Je pourrais aussi témoigner des ateliers d'écriture que j'anime, pas après d'un public déjà engagé dans une démarche créative, non, mais auprès d'un public qui très souvent soupirent lorsqu'il entend : "aujourd'hui, c'est atelier d'écriture"... D'ailleurs depuis, je dis plutôt : " Aujourd'hui, c'est atelier de torture, bienvenue !".

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    1. Hello Elly ! - "Atelier d'écriture = atelier de torture" : ce raccourci si cruel de ton difficile et méritoire vécu est hélas lucide... Pour essayer d'aller plus loin, je pense que le mot le plus important est atelier. Un atelier est, pour le meilleur des cas, une mise en commun de volontaires tentant de créer une œuvre commune ou des œuvres de même esprit commun. Ce peut-être, conception traditionnelle autoritaire, le Maître (Michel Ange, Rodin...) et ses humbles disciples (certains s'en révoltent, comme la pauvre et géniale Camille Claudel)... Ce peut-être, conception plus libertaire, une sorte de club informel ("les peintres de Pont-Aven", "les poètes de l'école de Rochefort-en-Terre", "les cinéastes de la Nouvelle Vague", n. groupes musicaux...).
      Et c'est souvent un terrible atelier de production industrielle (j'y ai pas mal galéré!!) ou - dans ton cas - un atelier pédagogique, notion très, très ambiguë !...

      J'ai eu, plusieurs fois, l'occasion de visiter et même d'être invité à diriger un tel atelier - plutôt pour adultes. Mais non : la maîtrise de l'écriture, à mon sens, ne peut être que connectée à la vie concrète de chacun, si particulière, et pas un "modèle" (qui confine au "formatage" utile à la soumission au système productiviste, etc.) le plus souvent (ex-caricatural : "le C.V.").

      Par exemple, étant à 14 ans pensionnaire en dur pensionnat picard, je DEVAIS chaque semaine écrire à mes parents restés sous "mon" soleil d'Égypte : la torture était que ma lettre était lue, avant départ, par le directeur, qui me convoquait: il était certes adroit pédagogue, me suggérant de corriger des tournures de phrase, des fautes d'ortho, des calligraphies ratées, etc. Puis il envoyait ma seconde lettre, quelle qu'elle soit. Cela m'a formaté au MENSONGE d'écrire... "tout va bien" !!!...
      OUF je me liais aussi d'amitié avec Phan, venant d'exil comme moi (lui de Saïgon), souffrant comme moi de cette torture de lettre hebdo. Ludiquement, nous avons de fait créé un "atelier d'écriture poétique" entre 2 ados très "spéciaux", en exil !!!...

      Depuis lors, inconsciemment, mes amitiés et amours ont toujours été orientée vers le partage ludique de cette liberté créatrice, bien au delà d'ailleurs que de simplement écrire : vivre en poésie, comme le fit et le proclamait le grco-suisse G.Haldas, encore un poète-papillon !!

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    2. Oui, vivre en poésie ! Mais quel chemin pour en arriver là...

      Je vais apporter une note tout de même positive à ces ateliers de "torture". C'est une entrée en matière un peu détournée pour rire et dédramatiser l'écriture. Bien des personnes ont des représentations négatives de l'écriture dues bien souvent au traumatisme (vécu) des cours de français. Or, après ces ateliers, j'en ressors en général contente car c'est avant tout un partage sensible que j'essaie d'instaurer. D'abord des jeux d'écriture pour mettre en confiance, puis la proposition d'un sujet d'écriture qui oblige à se dévoiler quelque peu... C'est alors un moment fort en émotions que nous vivons tous, avec, très souvent, des écrits très touchants... Et des larmes et des rires en partage, des personnes qui se re-découvrent, de l'empathie qui circule, des humains qui se souviennent que les liens sont si précieux...

      Belle journée Rem*

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    3. Merci, bonne soirée à toi, Elly , et à tous...
      Et bravo pour "des larmes et des rires en partage (...) des liens qui sont si précieux" dans tes ateliers : voilà bon espoir du "chemin pour en arriver à vivre en poésie" !

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    4. Je reviens sur ton indignation, très justifiée, des barbares destructions de Mossoul : sans en rien vouloir amoindrir cette abomination, je rappelle seulement que, mille fois hélas, de telles destructions culturelles barbares s'égrènent tout au long de la si douloureuse Histoire de l'humanité "cultivée", dans l'Antiquité des conquêtes et guerres (Babylone, Égypte, Perse, Grèce, Rome...) puis Christianisme en Europe "païenne", et, à grande échelle aux Amériques et Afrique : génocides culturels !

      En 1959, j'ai passé une semaine à me documenter à la Grande Bibliothèque d'Alger, sur des archives ANTI-colonialistes...
      Trois ans plus tard, j'ai appris, scandalisé, que, après tant de tueries criminelles, les barbares français du 20° siècle, l'OAS, avait incendié cette bibliothèque d'Alger !!!
      Il a fallu que, travail de fourmis, des Algériens viennent à Paris fouiller (autorisations à obtenir, etc. ...) les archives pour tenter de retracer leur propre sombre Histoire, 130 ans sous domination-destruction du colonialisme français...

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  3. Tout à fait autre chose, l'ACTUALITÉ : Allemagne-Grèce...

    http://fr.sott.net/article/24722-Histoire-Apres-la-guerre-Berlin-a-ete-le-roi-de-la-dette-et-n-a-jamais-rembourse

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