mardi 4 novembre 2025

Les églises brûlent en silence

Cathédrale de Salisbury

« La France assiste, impuissante ou indifférente, à la lente combustion de son patrimoine religieux. La destruction du monastère de la Chartreuse du Mont-Dieu n'est qu'un épisode supplémentaire d'une sinistre chronique. »
À la surface, comme dans un lac gelé, tout est lisse et brillant. Inodore. D’équerre. Rien n’existe réellement, car le regard ne peut atteindre que les parties les plus voyantes.
On marche. On s’agite. On esquive les coups. Quand on le peut.
Le nom des êtres et des choses n’est qu’une pierre tombale sur laquelle un anonyme a fait inscrire des choses oubliées, à commencer par lui-même. A peine un souffle et c’est déjà demain, un siècle plus tard. Ce souffle que le temps orne de mille facettes dans les rayons d’étranges bibliothèques.
Une croix ne représente que deux lignes volontaires qui se croisent comme on croise les doigts, symbole à la fois de crainte et d’espoir. De culture et de nuit noire !
Chaque pierre posée est un jalon dans la lente ascension vers les cimes. Pas pour dominer, mais pour mieux saisir la ligne d’évasion. 
Chaque pierre échouée est un pas en arrière et des douleurs dans le braille de nos pensées. Le prix de l’effort, de la contrainte, des joies et des souffrances se perd dans l’ellipse du verbe.
Une église qui brûle est un livre réduit en cendre. Une langue sans repères est une porte qui s’ouvre dans le vide sidéral. Une misérable particule jetée à la vitesse de la lumière vers un point de non-retour. Un mécanisme sans contrôle entraînant des troubles sévères de la mémoire. 
C’est dans cette auge que l’élite abreuve sa soif de vengeance, sans que nul ne sache quel en est l’origine. 
Quand la haine de l’autre se déclenche par simple impulsion, agissant comme un mécanisme déclencheur de la peur animale inhérente à l’être vivant, soit par instinct de conservation ou par stupidité, ce n'est pas vraiment l'autre qui est ciblé, mais la denrée périssable que nous sommes devenus.
Nous sommes devant l'échographie d'une décérébration programmée. Tout est enseveli sous les algorithmes, où chaque signe entraîne nos corps jusqu’au tombeau, où nous ferons inscrire, en guise d’épitaphe : « Qui a éteint la lumière ? »
C’est peut-être à ce moment que nous réalisons combien nous avons besoin d’elle ! 
 
Sous l'Casque d'Erby