dimanche 6 décembre 2015

Un dimanche électoral en démocratie

Dimanche. Quelque part en démocratie hexagonale. État d’urgence électoral.
Il est six heures du matin et le jour traîne un mauvais réveil. Encore deux bonnes heures avant de voir la gueule qu’il va tirer en pointant le blaire. Le ciel est plombé et le vent hulule aux fenêtres une rengaine sinistre. Ça sent mauvais !
La veille, le quidam avait envoyé des courriers électroniques à des collègues pour les inviter à déserter les bureaux de vote. « Un traquenard », avait-il écrit sans crainte ni regret. Aucun retour. Bizarre. D'habitude, ils répondent, mais avec le week-end, la décompression...
La porte s’ouvre si brutalement que le zigue, aussi blanc qu’un bulletin d’abstentionniste, n’a pas le temps d’être surpris. Plaqué sur la table et solidement attaché avec des menottes en plastique, il fait ouf, sans en être vraiment conscient. Il venait tout juste de finir son premier café, une bonne marque, la moins ruineuse, et, il doit l’avouer, l’effet est canon ! Comme celui du flingue qu'on lui poste sur la tempe.
« Habillez-vous et suivez-nous ! », commande d’une voix sûre une sorte de malabar cagoulé.
« Pour aller où ? Je veux un avocat ! », crie le sinistré totalement paniqué.
« Un avocat ! Ah, ah ! On n’a pas la conscience tranquille, hein !... Encore un qui fait dans le travelo !... Et pourquoi pas l’Etat de droit, pendant qu’on y est ! L’Etat, c’est moi ! Embarquez-moi ça ! », qu’il dit aux autres cagoulés qui ne se font pas prier pour exécuter l'Ordre.
Porté comme une plume, le prévenu est jeté dans un fourgon cellulaire, garé dans la rue, à la suite de tout un cortège, où d’autres prévenus, saisis pendant la nuit, plus ou moins amochés, ont été entassés. Des éclats de voix, des sommations, le jour naissant peine à cacher sa peur et le vent s’est fait la malle pendant que quelques fenêtres s'ouvrent, des têtes se penchent et disparaissent aussitôt.
Qu'on est bien chez soi, en sécurité !
Des portières claquent et, enfin, le cortège s’ébranle dans le bruit des sirènes et les lumières bleues des gyrophares.
Un quart d’heure plus tard le convoi fait halte devant l’école primaire du village le plus proche, où le bureau de vote est installé. On aligne les prévenus ficelés deux par deux. On leur fournit une petite enveloppe avec obligation de l’introduire dare-dare dans l’urne.
« A voté », répètent à la chaîne des voix machinales.
Une fois le « devoir civique accompli », on démenotte le troupeau, et on l'invite à regagner le domicile par ses propres moyens !
« Des questions ?», demande sans attendre de réponse le malabar cagoulé de tout à l'heure.
Ce jour de grâce de l’année 201… l’Hexagone a enregistré un taux de votants exceptionnel au premier tour des échéances électorales : 99%. Une première dans l'histoire de la France Libre !
Police et services de sécurité de l’État sont à la recherche du 1% manquant pour faire le plein au second tour !

Sous l’casque d’Erby


11 commentaires:

  1. Bonjour aux caillardeuses et aux caillardeux. Mon "devoir" accompli, je m'en vais écouter un peu de zyque.
    La bonne journée.

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    1. Merci à Odile pour les illustrations. Keny Arkana en zyque du jour, ça colle. Quant au Erby, plus explicite on meurt !

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    2. Bonjour la troupe et Merci beaucoup ! Comme un re-ssenti d'Octave façon Mirbeau à la Sauce Kenny sans oublieZ le poulet en ce jour!! Ouais des brouillons de Par-Tout..

      http://lesbrindherbes.org/2015/12/04/intro-libere-toi-de-la-cage-en-zikal-repos-de-fin-de-semaine/

      La biZ.

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    3. Salut ! Ah Mirbeau ! J'adore. De Sébastien Roch, à l'abbé Jules, aux contes de la chaumière, passant par les 21 jours d'un neurasthénique, quel régal ! Du vitriol au litron !

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  2. Merci, Rod, j'allais oublier. Je regarde très peu la télévision mais je ne manque aucune soirée électorale, j'aime le spectacle.
    Merci également pour la première image et son jeu de mots lisible par les seuls initiés de Lou dont tu es.

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    1. Merci Lou. Je partage aussi le "vice" des soirées électorales à la téloche.

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  3. Ben je dois faire partie des 1% encore abstentionnistes, ainsi qu'une bonne quinzaine de potes que j'ai salué ce midi (main ou bise selon...) où la terrasse du bistrot du marché était pleine !
    Mais j'ai oublié de me faire inviter ce soir voir le pestacle-télé, c'est grave, citoyen ?

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    1. Salut Rémi. Non, rien n'est grave, dès lors que l'on sait où l'on met les pieds : la télé, la radio, les journaux, les réseaux sociaux...

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  4. Perso, j'ai posé mon bulletin : "je ne vote pas sous la pression de l'ETAT d'urgence" après avoir contesté les bulletins FN et Dupont-Aignan qui ne respectaient pas le code électoral.
    Merci pour Kenny Arkana... cette petite bonne femme m'a bluffée quand je l'avais rencontrée (à côté du centre de rétention de Vincennes où elle était venue apporter son aide de rappeuse aux "retenus" en grève de la faim). Et ses chansons me bluffent encore plus... Elle est toujours là, et pourtant boycottée par les media mainstream... p'tain c'est qu'elle dérange, cette petite nana !
    Résistance !
    Clomani

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  5. Salut les coupines et les coupains. Hier j'ai fait mon devoir. J'ai pris ma tire, à 7h45 j'étais au bureau de vote, j'ai donné au président du bureau le papier que je venais d'écrire, proposant une nouvelle procédure plus fiable pour l'utilisation des machines à voter - puisqu'ici, machine il y a - j'ai attendu l'ouverture du bureau officielle, et vingt minutes plus tard je suis reparti - il n'était venu que deux votants hors ceux du bureau. Bien entendu, oui, bien entendu, je n'ai pas voté.

    Et ce matin, je suis tout délabré à l'annonce des résultats . Pour la France, je regrette seulement qu'il n'y ait pas eu suffisamment d'abstentions.

    Malgré tout, bonne semaine à tous avant un second tour "rigolo".

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  6. comme dit Léo
    "Ils ont voté ... puis après....

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