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Le « parler vrai »
est expression aussi courante et ambiguë que « le bon-sens »
ou « le compromis réaliste », etc.. Elle mérite à mon
avis réflexion. Peut-on parler vrai dans le carcan légal du système
électoral ? Ou celui de l'académisme universitaire qui nous
impose ses disciplines-carcans : Philosophie, Histoire,
Linguistique, Sociologie, « Science Économique ou Politique »,
etc. ? ...
N'étant
en rien de ces disciplines, moins encore d'aucun Parti, je reste
poète indiscipliné, sachant qu'est inépuisable la vérité de
notre condition humaine. Et je cherche, parmi tant d'autres, à
parler vrai, à partir de mon vécu éprouvant et de ma permanente
curiosité à « saisir le monde ». C'est ce vécu et
cette curiosité qui fut (et reste) pour moi LE critère fondamental
pour accorder confiance ou non à telle ou telle personne, très
indépendamment de ses diplômes, postes, de son bagout, etc.
*
Exemples :
MarcFerro
a du bagout, Jean-LucMélenchon
aussi. J'ai très tôt accordé ma confiance au premier, peu au
second. Ce n'est pas parce qu'ils ne jouent pas sur le même terrain
(géo-histoire pour le premier, politique pour le second) qu'il n'y
aurait pas de comparaison à faire !: ils s'adressent tous deux
au peuple dont je fais partie... et une bonne analyse géo-historique
est un préalable indispensable à un bon projet politique. De plus
ils sont tous deux membres de l'élite nationale, qui est (en
principe) dévouée à « nous éclairer », nous peuple
obscur. Mais
voilà :
*
Ferro
(né en 1924), étudiant en géo de Grenoble, menacé par une
ascendance juive et par le STO, est « monté au maquis du
Vercors » (43-44) et cette épreuve (puis, à la fin, la fuite
rocambolesque) le marquera à vie. Une vie universitaire pleine d'un
combat, certes culturel, mais important. D'abord guidé par Fernand
Braudel (« Les Annales ») il est très combatif pour
introduire le cinéma dans le domaine de l'historien, ainsi qu'une
foule de témoignages jamais pris au sérieux, car émanant du
peuple. Il étudie ainsi la Révolution d'Octobre et le régime
soviétique, le monde arabe et l'anticolonialisme, etc. sans
dogmatismes. Ni académique ni idéologico-politique : une
analyse « fine », mais simple car respectueuse des
faits... et des individus qui tant souffrent et agissent...
*
Mélenchon
(né en 51)
est
un classique produit de l'élite politicienne, qui démarre à
l'embauche du militant de base (à conviction sincère :
respectable!) dans les rouages de la machine électorale. Oh,
d'accord, « il connaît le terrain » (il a même été
dans sa jeunesse pompiste) et il « aime le peuple ». Et
puis, surtout, il reconnaît avoir fait des erreurs... A l'ambition
de ne plus en faire : « confiance »! Parcours banal
que de faire erreur, de grimper dans un projet politique zigzagant.
Il est moins banal de vouloir diriger une « Révolution Citoyenne »
ici. S'inspirant de l'Histoire de France... mais aussi, surtout du
modèle vénézuelien, aux données géo-historiques si
différentes... : Quelle erreur encore !
Conclusion :
Marc Ferro a durement gagné sa bataille de parler-vrai contre le
carcan universitaire et cela est utile au peuple, pour qu'il
s'instruise au mieux pour gagner ses batailles sociales. Mais il est
vain de croire à un parler-vrai de l'ambitieux Mélenchon. Quitte à
lui reconnaître ses qualités de tribun, de polémiste, dans
l'actuel brouillard politique d'entre si riche France et si pauvres
français !
*
A
propos de « parler-vrai », on pourrait multiplier les
exemples de gens, soit très connus - comme Mélenchon – soit à
mieux connaître - comme Ferro. Je préfère en revenir au parler
vrai, qui abonde
dans
notre peuple comme dans tout peuple :
et là, il n'y a pas de frontières, nous sommes entre curieux,
internationalistes, féministes et libertaires (consciemment ou
non) : nous nous comprenons et nous pouvons utilement nous
inspirer les uns des autres. Avec l'espoir de Liberté !
Ici,
les difficultés de communication sont linguistiques et culturelles.
Dont religieuses et surtout us et coutumes locales, souvent adaptés
aux conditions locales. Mais la musique, la chorégraphie et tout
autres formes d'art (architecture, peinture, etc.) transcendent ces
difficultés, ainsi que la conscience de devoir communiquer nos
soucis et nos innovations sociales, vers le mieux-être... Ainsi
chemine le parler-vrai, international.
Quelques
exemples seulement (ils fourmillent!) :
*
La
toute jeune fille pakistanaise Malala,
qui
arrive, malgré mille difficultés (elle a failli être assassinée)
à faire éclater le scandale de la terreur des talibans contre la
scolarité des filles dans son pays (et partout où s'exerce ce type
de terreur pseudo-islamiste, Afghanistan, Niger, Irak-Syrie...).
*
Le
tout vieux PierreRabhi, français d'origine algérienne, qui parvient très très
laborieusement à devenir pionnier-paysan-écologiste et même
philosophe-poète... et inspire – entre autres - « les
Colibris ». Il reconnaît humblement qu'il doit son énergie à
l'amour d'entre sa femme et lui...
*
Les
anonymes (ou pas) artistes-ès-gratiffis qui « habillent »
l'autre mur de la honte, israélien en Cisjordanie (bien pire que
celui de Berlin!) et le transforment en vaste exposition permanente
de dénonciation internationale du colonialisme, souvent avec un
humour noir plus percutant, sans doute, que de classiques slogans et
discours ...
*
Des
groupes, chanteurs et musiciens, qui, tels Zebda, lancent des tubes
comme « Tomber la chemise » et surtout « Y a pas
d'arrangements » qui ont un impact socio-culturel, donc
politique, bien supérieur aux discours de ces gens « sérieux »,
dirigeants syndicaux ou politiciens bavards...
*
Des
autochtones (dits « indiens ») d'Amérique du Sud qui
sortent de leurs forêts pour dénoncer les brigandages meurtriers
des exploitants (illégaux, souvent) de bois ou de minerais (dont
pétrole)... : certaines tribus étaient si ignorées qu'il n'y
avait nul interprète de leurs langues... mais, à force de patience
et de science (de la linguistique), on les a compris... et ils ont eu
gain de cause, parfois...
*
Les
« zadistes » (de Zone à Défendre) qui occupent
l'officielle « Zone d'Aménagement Différé » pour le
chantier d'aéroport à Notre-Dame des Landes. Depuis des années, en
bonne intelligence avec les paysans résistants locaux, cette
occupation de fait, malgré des agressions policières, est la force
principale qui a fait la notoriété (nationale et plus) de leur
juste cause. Qui peut gagner !...
*
Je
termine, volontairement, cette courte liste, sur cette belle cause
d'ici, du « Peuple
de Boue ».
Pour la compléter lire par exemple :''Un
million de révolutions tranquilles'',
de Bénédicte Manier, éditions Les Liens qui Libèrent (LLL). On y
trouve des luttes certes partielles, mais originales, qui ne sont pas
autant de « RRRévolutions », sinon qu'elles parlent vrai
et agissent vraiment : cela révolutionnent les mentalités, les
mœurs et les rapports de force entre pouvoirs et populations. Cela
annonce la fin du capitalisme : il est, en fait, de plus en plus
faible et par conséquent arrogant de terreurs maladroites contre la
multitude de gens qui, plus que jamais instruits, parlent vrai en
aspirant à la
liberté et la justice sociale, naturelle. Naturellement, le dernier
mot sera au poète :
(…)
Je
quête un enfant souriant au jour,
Non
une place dans la machine de guerre.
Je
suis venu ici vivre le lever des soleils,
Non
leur coucher.
Il
me fit ses adieux...
Il
était à la recherche de lys blancs,
D’un
oiseau accueillant le matin
Sur
un rameau d’olivier.
Il
percevait les choses
Telles
qu’il les ressentait... et les sentait.
La
patrie, il me l’a dit,
C’est
boire le café de sa mère
Et
rentrer, à la tombée du jour, rassuré.
MahmoudDarwich
(fin du long poème « la terre nous est étroite et autres
poèmes »), traduction d’Elias Sanbar, Gallimard 2000).
Coucou !
RépondreSupprimerTrès chouette texte, et bien sûr je te rejoins dans ce que tu dis. Mais en somme, le parler "vrai" ne peut aller sans un agir "vrai". C'est ce que certains philosophes nous disent je crois... Cohérence entre nos paroles et nos actes + une éthique... Alors, les politiciens, en général, tu vois ce que j'en pense... Entre ce qu'ils font et ce qu'ils disent, il y a tout un monde. Et parmi nos élites, peu en effet sont capable de probité.
On pourrait citer aussi Marjane Satrapi, Hubert Reeves, feu Albert Jacquard, etc.
Bon, allez, c'est la rentrée, je file ! Des bises :-)
Bonjour les caillasseux. Temps immuables. Très belle bafouille avec les ingrédients nécessaires pour faire fonctionner la turbine à comprenette. Moi aussi, j'ai apprécié le bonhomme Marc Ferro que j'ai croisé à l’École Pratique des hautes Etudes. A l'époque, il partageait le bureau avec Claude Lefort, mon directeur de thèse.... Nous avons parlé... couscous ! Vrai !
RépondreSupprimerBonne journée à tous, je m'apprête à m'apprêter !
J'ignorais, mon ami, qui tu avais connu Marc Ferro à l'EPHE... que j'ai un peu fréquenté, ainsi que l'Institut de Géographie, mais en auditeur libre, quand j'avais le temps, entre 2 activités syndicales (UNEF 64-67)... Mais, plus tard j'ai bouquiné ses travaux sur la Révolution d'Octobre "décortiquée", ainsi que sur les colonisations (GG-France) au Proche-Orient...
SupprimerSalut les bidules ! Ouf, il y a 5 heures je n'étais pas couché encore.... cela ne m'empêche pas de savourer les envolée du grand Rem*. Allez, un peu de café pour éveiller la machine....
RépondreSupprimerReka est " géographe cartographe information designer journaliste rêveur utopiste partageur " sic. C'est à lui que je dois le contexte de ce poème (vieux de plus de 40 ans) de Mahmoud Darwich... : Contrairement à ce que l'on pourrait croire il ne s'agit pas, pour ce "rêveur de lys" d'un jeune palestinien, mais d'un jeune israélien, mais d'un jeune israélien, écœuré de ce qu'il a vu et dû faire dans son armée Tsahal, lors de la guerre de 67 qui commença l'actuelle occupation de la Cisjordanie. Ce jeune Israélien inconnu, AMI de Darwich, va le voir pour l'informer qu'il veut fuir Israël. Ils discutent toute la nuit. Et au matin, Mahmoud réveille son ami, lui donne son poème d'insomniaque...
RépondreSupprimerRésultat ? son lecteur va changer d'avis. Il reste en Israël, étudie, étudie... devient historien israélien anti-sioniste : c'est SHLOMO SAND, le très réputé auteur de (entre autres) "Comment le Peuple Juif fut inventé" !!
Lien vers ce récit (et poème) : http://seenthis.net/messages/234474 copié le 6 mars 2014 de Rezo Net
Supprimer" Je ne sais pas quel sera le bilan « touristique » de cet été agité sur le plan météorologique, mais il y a au moins une catégorie de commerçants et d’industriels qui peut se frotter les mains, ce sont les marchands et les fabricants d’armes. Eux ne connaissent pas la crise ! Palestine, Irak, Lybie, Ukraine, Syrie… à feu et à sang… Les grossistes en munitions de tous formats se frottent les mains et se congratulent mutuellement dans les salons feutrés où ils ont l’habitude de se rencontrer. Un grand merci aux gouvernements occidentaux, à celui des Etats-Unis en particulier. Dans la plupart de ces pays où la mort vous guette à chaque coin de rue, le gendarme du monde est venu faire un tour pour expliquer aux autochtones attardés ce que c’était que la démocratie. La démocratie c’est comme la religion : ce sont des affaires qui marchent ! Tous les prétextes sont bons pour se flanquer une bonne raclée mutuelle." (...)
RépondreSupprimerC'est le début du billet, exemple de "parler vrai" évident pour moi, du blog "La Feuille Charbinoise" à découvrir, colonne de droite !
J’aime Mélenchon , c’est inconditionnel, même si je sais qu’ils sont tous les mêmes et même si mon ami Pim me sonnait à l’époque des élections que j’étais épinglée comme un drap sur un fil à linge...Je n’ai pas aimé son attitude sur le nucléaire trop lié au PC. J’admire l’homme !
RépondreSupprimerMoi aussi j'aime le Méluche. Pour les raisons évoquées et par sentimentalisme peut-être puéril. Il est d'origine espagnole, né au Maroc, à deux pas de chez moi, famille catho, la mienne aussi, antifranquiste, moi aussi, batailleur, moi aussi. Mais, contrairement à lui, j'aime Bakounine, les situationnistes et fais tout ce que je peux pour que ces idées me survivent, ce qui n'est pas le cas chez les politiciens, lui ou un autre... A un moment, dans la vie, il faut savoir où se trouvent les barrières délimites... J'ai eu la chance de comprendre ça assez tôt. Merci le hasard !
RépondreSupprimerDes parcours plus ou moins exemplaires, sources de modèles, mais tout le monde n'est pas ainsi... Et, à trop les mettre en exergue on tombe dans l'idéologie individualiste... Et j'allais dire neoliberale.
RépondreSupprimerPas d'accord du tout !
Supprimer1- "tout le monde n'est pas ainsi" : certes, et alors ? Il faut suivre les moutons dociles au capitalisme aliénant, parce qu'ils sont "démocratiquement majoritaires"... d'élire un Sarko puis un Hollande ???
2- "trop les mettre en exergue" : pourquoi "TROP" ? vaut mieux mettre en exergue les "people" de la presse de caniveau ?
3- "idéologie individualiste" : qu'est-ce que ce "isme" vient faire là ? J'ai cité des INDIVIDUS (Malala, Rahbi, Darwich, précemment Ferro et Mélenchon), certes. Qui sont TOUS dévoués à mettre leurs talents au service de leur société : c'est bien le contraire de l'individualisme, non ??
4- "néolibérale" ?????? : alors là, quel contre-sens absolu !
Oui, c'est souvent le hasard qui, d'erreur en erreur, nous fait progresser vers quelques vérités éprouvées, plus lucides. J'en connais un rayon, côté erreurs et épreuves... correctrices. Pour moi, la voie poétique, au sens large, m'a guidé et sauvé... et les voix puissantes de quelques poètes comme Federico Garcia Lorca, Whitman, Kateb Yacine, Edouard Glissant, Mahmoud Darwich entre autres : "le parler vrai"...
RépondreSupprimerJe pense tout à fait comme toi Rem : la voie poétique ! Et de même pour moi, elle m'a guidée.
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