Source |
C'est guidé par le
conseil de Didier Goux, il y a un moment déjà, que, après lecture
de « La rue des maléfices », de Jacques Yonnet, livre
insolite où il est question de Paris, de son histoire, de sortilège, de mangave
et de la Mouffe, que je me suis accroché aux basques d'Henri Calet,
écrivain élégant et
mélancolique, homme de bien - aussi bien et aussi bon que le premier cité - et ce fut un grand plaisir.
Raymond Théodore Barthelmes, son état civil, était aide-comptable dans une société de câblage jusque dans les années 1930. Je vous laisse deviner les conditions de travail à l'époque où l'heure des congés payés n'avait pas sonnée le quart. Que d'éloges de la part du personnel de l'entreprise et de ses supérieurs sur ses compétences et son amabilité après un départ brutal : un employé modèle. Qui s'en serait douté !...
En effet. Suivant une prise de conscience, comme on en cherche dans nos sociétés présentes, il faussa compagnie à l'entreprise avec, sous l'bras, le contenu de la caisse, soit l'équivalent à l'époque de plusieurs années de salaire ! Pécule patiemment compté, vite embarqué, qu'il se dépêcha de dilapider en Amérique du Sud, qu'on ne nommait pas encore Latine. C'est à cette époque que Raymond Théodore Barthelmes, patronyme difficile à porter, devint Henri Calet, pseudo bien plus discret et facile à retenir.
Après tours et détours dans ce continent profond, pris de nostalgie, il revint à la case départ : Paris !
Parisien de cœur et d'âme, sa ville lui manquait. C'est là toute la force de persuasion des racines : on ne les quitte que pour mieux les retrouver, quel qu'en soit le prix à payer...
Raymond Théodore Barthelmes, son état civil, était aide-comptable dans une société de câblage jusque dans les années 1930. Je vous laisse deviner les conditions de travail à l'époque où l'heure des congés payés n'avait pas sonnée le quart. Que d'éloges de la part du personnel de l'entreprise et de ses supérieurs sur ses compétences et son amabilité après un départ brutal : un employé modèle. Qui s'en serait douté !...
En effet. Suivant une prise de conscience, comme on en cherche dans nos sociétés présentes, il faussa compagnie à l'entreprise avec, sous l'bras, le contenu de la caisse, soit l'équivalent à l'époque de plusieurs années de salaire ! Pécule patiemment compté, vite embarqué, qu'il se dépêcha de dilapider en Amérique du Sud, qu'on ne nommait pas encore Latine. C'est à cette époque que Raymond Théodore Barthelmes, patronyme difficile à porter, devint Henri Calet, pseudo bien plus discret et facile à retenir.
Après tours et détours dans ce continent profond, pris de nostalgie, il revint à la case départ : Paris !
Parisien de cœur et d'âme, sa ville lui manquait. C'est là toute la force de persuasion des racines : on ne les quitte que pour mieux les retrouver, quel qu'en soit le prix à payer...
Homme raffiné, fin lettré, Henri
Calet est mort d'ennui, pourrait-on dire, à l'âge de 52 ans, un
poil trop tôt à mon goût. Il est cet écrivain qu'on lit ou qu'on
découvre au-delà de ce seul livre, dont le titre est on ne peut
plus évocateur.
Dans cette époque sans repères, malgré lustre et illustre, il est bon de trouver, non pas le refuge du lâche, mais la source innocente de l'enfance, de le jeunesse et des... dérives indécentes. N'allez pas penser que l'homme était une sorte de dandy trimballant une élégance désabusée de salon en salon pour le seul plaisir d'un ego en mal de d'adulation. Ce gars en avait dans le calcif. Il venait de la basse et avait traîné guêtre en des endroits que le bourgeois ne fréquente pas. De père anar et de mère flamande, lustrant du parquet et faisant du ménage pour subsister, rongeant une frustration latente, mais gardant silence, pleine d'abnégation, disait-on jadis pour désigner la bonne bête de ménage, l'enfance de Calet est à l'image de son époque : dure. Il en parle avec tact, il est des douleurs qu'on n'étale pas à la fenêtre comme on étend son linge. De son extraction modeste il a gardé le goût du travail bien fait et un naturel très original. Tous ceux qui l'ont croisé, Camus entre autres, l'affirmaient : un atypique. Un rétif à toute forme d'inféodation. Un homme de grande classe.
Dans ses articles, pour Combat ou dans l'hebdomadaire Terre des hommes, on aimait ses papiers pour la liberté de ton et la singularité des sujets. Jamais là où on l'attendait, mais toujours au bon endroit. « Ses articles n’étaient pas tout à fait comme les autres. », a-t-on dit à leur sujet.
Paris et Calet n'en font qu'un. Où qu'il se trouve, Paris l'accompagne. Quand on lit ce qu'il écrit au sujet de cette maîtresse négligée mais jamais oubliée, au moment des retrouvailles, on sent qu'à l'intérieur de cette passion amoureuse et poétique couve un feu que même la mort ne peut ensevelir. Il sait tous les chemins, il connaît tous les plaisirs, sans rien ignorer de son ignorance. Au bruit du pavé, il vous dit de quel côté de la Seine vous vous trouvez. Au son de la pluie qui tombe sur les toits, il sait « les plans, les matériaux, les classes, les âges, les beaux et les vilains quartiers… »
Dans cette époque sans repères, malgré lustre et illustre, il est bon de trouver, non pas le refuge du lâche, mais la source innocente de l'enfance, de le jeunesse et des... dérives indécentes. N'allez pas penser que l'homme était une sorte de dandy trimballant une élégance désabusée de salon en salon pour le seul plaisir d'un ego en mal de d'adulation. Ce gars en avait dans le calcif. Il venait de la basse et avait traîné guêtre en des endroits que le bourgeois ne fréquente pas. De père anar et de mère flamande, lustrant du parquet et faisant du ménage pour subsister, rongeant une frustration latente, mais gardant silence, pleine d'abnégation, disait-on jadis pour désigner la bonne bête de ménage, l'enfance de Calet est à l'image de son époque : dure. Il en parle avec tact, il est des douleurs qu'on n'étale pas à la fenêtre comme on étend son linge. De son extraction modeste il a gardé le goût du travail bien fait et un naturel très original. Tous ceux qui l'ont croisé, Camus entre autres, l'affirmaient : un atypique. Un rétif à toute forme d'inféodation. Un homme de grande classe.
Dans ses articles, pour Combat ou dans l'hebdomadaire Terre des hommes, on aimait ses papiers pour la liberté de ton et la singularité des sujets. Jamais là où on l'attendait, mais toujours au bon endroit. « Ses articles n’étaient pas tout à fait comme les autres. », a-t-on dit à leur sujet.
Paris et Calet n'en font qu'un. Où qu'il se trouve, Paris l'accompagne. Quand on lit ce qu'il écrit au sujet de cette maîtresse négligée mais jamais oubliée, au moment des retrouvailles, on sent qu'à l'intérieur de cette passion amoureuse et poétique couve un feu que même la mort ne peut ensevelir. Il sait tous les chemins, il connaît tous les plaisirs, sans rien ignorer de son ignorance. Au bruit du pavé, il vous dit de quel côté de la Seine vous vous trouvez. Au son de la pluie qui tombe sur les toits, il sait « les plans, les matériaux, les classes, les âges, les beaux et les vilains quartiers… »
Allez demander à cette maitresse de changer
d'amant. « Les souvenirs sont comme des lianes… », écrit-il.
Quand il parle du petit Montrouge, son point de référence, son lieu
de naissance, ses racines, il est impossible de ne pas les aimer :
Paris et Calet.
Le tout sur le tout - Henri Calet - L'imaginaire - Gallimard - 7€ environ.
Le tout sur le tout - Henri Calet - L'imaginaire - Gallimard - 7€ environ.
PS : L’écrit parle, association littéraire, animée par Gérard Lambert Ulmann, auteur du dernier chapitre, dont Rémi a fait sa chronique du 23 mars, consacre une Lecture apéritive avec Henri Calet, jeudi 24 avril à 18 h 30, Au Skipper : 1 Boulevard René Coty à Saint Nazaire.
Bonjour les caillasseux. Temps insolites.
RépondreSupprimerLa France est menacée par un nuage de pollution très actif. BHL, l'homme de toutes les mondanités, quitte les palaces 5 étoiles qu'il occupe d'ordinaire pour proposer sa "médiation" : Sourire en coin : Nuage de pollution – BHL propose une médiation
Dire que Paris ses recoins, ses mystères , ces oeuvres d’art et d’architectures vont être vendu au plus offrant à en décimer son histoire...
RépondreSupprimerOui, l'ami Gérard, désormais animateur de l'asso "l'écrit parle", présente en fin de journée aux nazairiens HENRI CALET, qu'il m'a fait découvrir il y a longtemps dans sa librairie , désormais défunte. En principe j'y vais... mais je ne serai pas le seul à regretter son arrière-salle - nommée Scutenaire (autre immense écrivain trop méconnu qu'il fit connaître) -, car cette soirée bavarde se déroule désormais dans le plus "chic" bistrot de la ville, dommage !... : adieu le "à la bonne franquette" d'hier !...
RépondreSupprimerLe 24 avril 2013, l’effondrement, au Bangladesh du Rana Plaza faisait des milliers de blessés et de fous de douleur, en plus des 1135 morts officiels. Ces ouvriers, massivement des femmes, fabriquaient nos vêtements pour les plus grandes marques occidentales. La date de cet épouvantable drame (non isolé!) s'efface déjà de nos mémoires, alors que reste celle, à peu près aussi meurtrière, du 11/09/2001: l'effondrement des 2 Tours New-York. Mais la mort d'un valet du business n'est pas égal à un mort de la misère prolétarienne... Ah bon ?...
RépondreSupprimerFaut pas croire Rémi. Parfois il y a des "bonnes" surprises, comme hier à la téloche (que tu n'as pas). La couverture faite par BFM et I-Télé sur le méfait patronal du Rana Plaza a été faite très correctement...Nous avons même appris que depuis cet accident les salariés ont été grassement augmentés, ce qui leur fait à l'heure actuelle des salaires de 68€/mois !...
SupprimerDidier Goux, l'ennui personnifié !
RépondreSupprimerJe connais Didier Goux et pour ma part je ne le trouve pas ennuyeux, et son blog est excellent.
SupprimerBien content que vous ayez aimé Calet ! Du même, je me souviens d'avoir lui une série de reportages qu'il avait fait juste après la Libération : il s'était rendu dans les cellules des différentes prisons où avaient été enfermés les résistants, "terroristes", etc., afin d'y relever les grafittis laissés par eux sur les murs : passionnant, parfois même bouleversant. J'ai oublié le titre du livre, mais ça doit se retrouver facilement.
RépondreSupprimer