Par babalouest
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(en français : je pense donc je suis)
(extrait du Discours de la Méthode)
Mais, aussitôt après, je pris garde que, pendant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallait nécessairement que moi, qui le pensais, fusse quelque chose. Et remarquant que cette vérité : je pense, donc je suis, était si ferme et si assurée, que toutes les plus extravagantes suppositions des sceptiques n’étaient pas capables de l’ébranler, je jugeai que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de la philosophie que je cherchais.
Mais, mon cher Monsieur Descartes, pour énoncer cet aphorisme, il faut que vous l'ayez pensé : en français du XVIe siècle, ou en latin, peu importe. Pour le penser, il a fallu que, dans votre tête, se construise cette phrase. Pour construire cette phrase, il a fallu que quelqu'un vous apprenne la langue permettant de la construire, avec son vocabulaire, sa syntaxe, différents des mêmes significations dans d'autres langues.
Prenons le cas, certes aujourd'hui rare, d'un enfant d'hommes recueilli très jeune par une louve : êtes-vous si intimement persuadé qu'il pourra construire une phrase dans une langue qu'il ne connaît pas ? Or, la louve est ; l'enfant est ; sauf qu'ils ne savent pas comment l'exprimer. Ce sont pourtant deux êtres différents l'un de l'autre.
On peut en conclure qu'un précédent doit préexister à votre aphorisme : je suis né dans le cadre d'une société, qui m'a au moins inculqué ce qu'on appelle la langue maternelle. Peu importe aussi que la famille, même réduite à la mère, manque d'éducation : elle aura malgré tout un langage, peut-être fruste et réduit, mais un langage, ce qu'une louve même très maternelle ne pourra pas transmettre, parce qu'elle n'a pas elle-même cette sous-couche si réduite soit-elle.
Allons plus loin : dans une famille très fruste bien qu'humaine, il y a fort à parier que les échanges verbaux se réduisent aux moyens de survie les plus élémentaires. Ne pourrait-on douter que, provisoirement rassasié, un membre de cette famille se mette soudain à prendre du recul, à douter, à philosopher ?
Ce qui peut amener à penser, pour le coup, que naître dans un milieu suffisamment favorable à cet exercice ne va pas de soi.
Voilà qui pourrait inciter à transformer l'aphorisme, à le complexifier, pour en arriver à :
« Je suis né en société, dont j'ai appris la langue : armé de celle-ci ma tête a réfléchi, et oui, le pense, donc je suis », ce qui amène à la proposition inverse : je peux bien être le plus intelligent du monde, si je n'ai pas de langage parlé pour l'interpréter je ne suis pas. La pensée ne peut exister sans langage articulé.
Après tout, cela nous ramène à Shakespeare, son Hamlet s'interroge : Être, ou ne pas être, voilà la question !
Sous l'Casque d'Erby
Hoy ! Voilà donc ma prose chez Rodo.... j'espère que René, du haut de .... je ne sais quoi, saura apprécier et ne se mettra pas en colère. En tout cas, ça nous change d'une actualité parfois.... amusante ! Bonne journée à tous !
RépondreSupprimerJC
Quand je parle de René, ici il s'agit bien de René Descartes..... qui a fréquenté la même université que moi, avec beaucoup d'années d'écart.
SupprimerBonjour les filles. Bonjour les garçons. Je suis heureux de céder la place à l’ami Babel sur un sujet qui nous change de l’habituelle charge contre les gangsters de la politique. En Nouvelle-Zélande des milliers de manifestants dans la rue « contre les mesures sanitaires du gouvernement ». Le mot d’ordre des manifestants : « Tous en prison ! » Ils parlent des membres du gouvernement et du parlement, bien sûr. Après tout, à quoi servent-ils sinon à pourrir nos vies et à détruire ce que nos mains ont si durement bâti pendant des milliers d’années ? Pour mémoire, souvenons-nous de la crise politique survenue en Belgique : pour cause de désaccords profonds entre les sagouins des différentes factions, elle fut privée de gouvernement pendant un peu plus de deux ans. S’est-elle effondrée ? A-t-elle-même remarqué l’absence de dirigeants pendant cette période ? Je ne le pense pas !
RépondreSupprimerAlors, la question du jour est simple : suis-je ce que je suis parce que je pense, ou je pense parce que je suis ? Après avoir ferré le poisson, je le laisse aller à sa guise, jusqu’à épuisement, avant de le ramener vers le bord. Pendant ce temps, j’émince les oignons, je coupe les tomates en morceaux, je mets le tout de côté, avec sel, poivre et autres condiments, tout en ramenant la bête à sa destination ultime, mon assiette !
Le tout étant sujet, évidemment, au fait que la ligne ne casse pas entre le moment où je pense être et le moment où je suis réellement en train de déguster la prise.
Découvert dans ma boîte, les bricoles de René (pas l'autre), le nôtre. Du coup, j'ai actualisé le crobar du jour.
La bonne journée !
"Je pense donc nous sommes" serait plus inclusif! :D
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