mercredi 13 mai 2015

Jean-René Gourdin, président de CAT à Trélévern, poète.

Semaine poétique et artistique chez les caillouteux. Plutôt que de continuer avec la remarquable série de Rém* sur la Nature : le feu, l’eau, l’air et la terre, et afin de ne pas la rendre redondante avec les 3 prochains éléments à venir, ce qui finit par lasser le visiteur en quête d'autres sensations : de la poésie, encore !, on change de sujet et d'auteur, en conservant l'esprit.
Jean-René Gourdin, membre de l’Artche des sens, président discret et travailleur de « Convivialité à Trélévern », association artistique dont il est, parmi d’autres très bons artistes locaux, la cheville ouvrière aime et respire la poésie. Il fait du très bon travail alternatif pour nous aider, et s'aider aussi un peu, à sortir de l'ornière télé-bobos et décérébration massive, portant poésie sous les paupières et partout où ses fibres vibrent.
Puis, les gars qui aiment Bernard Dimey et qui le disent haut et fort, la brillance qu'il faut dans le regard, ben, c'est des gens bien. De plus, sa poésie à deux boules, comme il dit en riant, je l'ai aimée. Voici quelques extraits :

PRÉSENTATION EN POÉSIE

Parfois tout ce qui m’anime
Et qui n’est pas matière ni mécanique de moi
S’effondre me quitte m’échappe et s’échappe
En volutes imprécises
Entremêlant leurs spires
En un flux vibratoire inondant
Où je me noie
Sensation indicible forte et floue
D’étrange et chaude mouvance en moi
Et hors de moi
Indescriptible impression d’un chaos
De mouvance liquide et doucereuse du moi
Fondu dans le grand soi universel
La lave originelle
Éphémère fusion au monde élémentaire réunifié
Unité insoupçonnée du magma initial
Pressentie retrouvée l’espace infini d’un instant
Que m’arrive-t-il ?
Juste savoir sentir porter
Des traces d’indélébile éternité
Savoir l’essence du vide
Sentir le silence et sombrer 
S’anéantir en la brûlante mouvance du fluide
Qui seul m’anime
Où tout, tout à coup, en un éclair s’éclaire
Et me précipite
Dans l’inexplicable et suprême certitude
De la vérité effleurée
Submergé ébloui à la vive et blanche lumière de l’évidence
Et je reviens sans souvenance
De l’absolu moment de plénitude
Si ce n’est l’infime éphémère persistance
De la perception spontanée du vertige vrai du vide
Qui doucement douloureusement s’estompe
Dans le retour des choses
De l’autre soupçonnable et physique réalité




COURT MÉTRAGE

Assoupi
À l’image floue du film sans fin
Aux drogues langoureuses
Aimables
De ta voix melliflue
Enivré
Aux parfums de tes ombres recoins
Fragrances de ton corps fleur
Yeux et sexe
Fixation de l’espace
Au bonheur immobile
Une fraction de temps
Au celluloïd chaud
Fondant sous mille watts de vie
Ré-embrayage instinctif
Du long ruban d’habitudes
Tacheté d’images brûlées
Rêves éphémères
La lanterne arrêtée me consume
Étisie
Visa de censure
Numéro un
Fin



MARÉE NOIRE

Ornières détresse
Calvaires
Fougères sentiers
Chemins de terre
Chapelles croulantes
Pierres du passé
Muettes
Lourdes de siècles
Enracinées
Livres ouverts
Du temps qui s’accroche
De ses genêts barbelés
   Sur la lande et les rochers
Pages fanées jaunies
Éparpillées
Au souffle iodé
Si vivifiant
Virile caresse
De l’océan
glacé violent
Chantant léchant
Lissant sans cesse
L’hermine vierge
Des grèves blanches
Poussant ses craintes
De l’Ankou noir
Métallique
Au vent des cours vides
Des fermes de la nuit
Où les chiennes hurlent
Sirènes de mort
Éclaireurs reprenant
La plainte salée du vent
Qui pleure sa peur
Du monstre fragile
Angoissant
Chargé tout noir
et divagant
Frôlant la côte
Qui dort
      Toutes griffes dehors






CRAPULES

Graines de violence
Chiendent, ivraie, parasites
Marginaux de tout poil
Paumés de toutes étoiles
Nourris de musique et d’ennui
De silence  d’indifférence
Enfants jamais grandi
Laissés aux bords des chemins sociétaux
Comme la mauvaise herbe d’errance
Qu’ils fument parfois
Rebelles, paresseux, asociaux
Enfants délinquants incompris
Par vos aînés normopathes et peureux
Ceux là même qui ont oublié
Qu’éduquer c’est humaniser
Rois de la débrouille
De l’embrouille non officialisée
Déclinaisons fractales
De l’escroquerie légale
Des marchés déréglementés
Laissés pour compte stigmatisés
Par ceux-là même qui se vantent
De vous assister
Et qui vous laissent crever
Près des décharges et des taudis à ciel ouvert
Dans des banlieues ghettoïsées
Vauriens, sans cœur, pervers
Enfants des villes et des quartiers
Enfants de toutes les cités
Rubalisées
Créatifs ignorés, artistes, poètes
Abeilles à l’écart de la ruche
Fourmis à l’écart des lisiers
Sauvages à l’écart des troupeaux
C’est la devise « sauver sa peau »
Dans le vacarme démocratique
Et le fasseyement des drapeaux


A publié L'Aimée chez Edilivre



Sous l'casque d'Erby

Casse octet basic !...


9 commentaires:

  1. Bonjour caillardeuses et caillardeux. Superbe mois de mai. Il ne manque pour qu'il soit parfait que ce brin de folie qui l'a parfois rendu historique... Ah, le Erby du jour !

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  2. très belle idée cette semaine poétique

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  3. Très bonne initiative que d'alterner ainsi diverses voix poétiques...
    J'avais déjà découvert Jean-René Gourdin via l'Artche des Sens et le relis avec plaisir et émotion. Le poème "Marée Noire" en particulier.

    A propos de "il ne manque pour qu'il soit parfait que ce brin de folie qui l'a parfois rendu historique", je me (et vous) rappelle que MAI 68 fut précédé de 5 années (1962-67: contexte Algérie, Cuba, Vietnam, Chine, Palestine...) d'effervescences sociales, politiques et... culturelles (poésie, rock & folk & yéyé, ciné et théâtre...): personnellement, les pôles poésie et politique m'ont ensemble formé, sans exclusion l'un de l'autre. Grâce à des aînés qui "perçaient alors", comme Edouard Glissant ou Kateb Yacine. Et, à Paris, nous avions à la "Joie de lire" (l'audacieus librairie de François Maspéro) pour notre joie... de chaparder si fauché, ce qui n'était pas rare pour des jeunes comme moi !!!

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    1. Et comme le mec François il n'appelait jamais les flics, c'était tellement simple et révolutionnaire (là je tousse) de lui piquer des bouquins
      ça vous gratouille ou ça vous chatouille?
      ;-)

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    2. @Jean Jacques - "le mec François" savait ce qu'il faisait en protégeant ainsi la jeunesse pré-révolutionnaire et fauchée : lui et ses fidèles amis s'en expliquent fort bien dans le (gros) livre collectif (paru de son vivant, en 2009), intitulé "François Maspéro et les paysages urbains"... : si tu veux, je te le prêterai "quand je je l'aurai lu en entier"!...

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    3. J'ai retrouvé le lien d'un bon article sur F.Maspéro, où j'ai laissé un commentaire sur la façon dont j'ai connu cet homme, avec qui j'ai parlé de ces vols à la librairie : voir http://www.histoiresordinaires.fr/rebelleinformer/En-hommage-a-Francois-Maspero_a225.html

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  4. Combien finiront marchands d'armes ?
    ;-))))

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    1. Je ne comprends à qui tu fais allusion dans ta question !

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