mercredi 15 avril 2015

Les mots bien-pensants...

Source

Les mots bien-pensants sont bien pesants
Un poème c'est une claque du vent

Et ça te déconstruit et ta grammaire et ton vocabulaire

C'est pas crac-boum-hue ni carabistouille non plus

mais ça te chuinte d'entre les zoneilles

et les zorteils pareil

et d'entre ces zozos itou



Poème

grand éclair vert dans un immense ciel bleu

éclair du regard de l'enfant rieur qui fait

trou dans ton blindage d'adulte coincé

absence de merci de qui a reçu aumône bien-pensante

et

merci incongru au flot qui emporte liasse de billets de banque



et c'est

le Michaux de « clown » 

(fin du poème) :

Je plongerai.
Sans bourse dans l’infini-esprit sous-jacent ouvert
     à tous
ouvert à moi-même à une nouvelle et incroyable rosée
à force d’être nul
et ras…
et risible…

*

Source
Les mots bien-pensants sont bien pesants

ça pèse sur l'inconscient formaté du citoyen-lambda

couvercle vissé de cocotte-minute au feu

dont le sifflet de soupape de sécurité

chante sa plainte lorsque dedans ça bout...



c'est le bleu blues du nègre esclave dans le champ de coton

c'est le cri gris du coolie d'Inde et de Chine

c'est le flamenco de libre Andalousie aussi

qui est aussi flamenco d'Andalousie asservie

et

c'est le Barcelone de 1936 : l'ordre anarchiste, à poursuivre.

-

Notes –

- le poème « clown » entier 

- pour les plus patients, lire le savant, beau et long commentaire (où l'on peut par exemple lire : « Sa protase se déploie / où son apodose s'éteint »!) ici.




Sous l'casque d'Erby


12 commentaires:

  1. Dans la même veine que Michaux? :
    De Eugène Savitzkaya, auteur du roman « Fraudeur » (Minuit, 167 p., 14,50 euros) et du recueil de poèmes « À la cyprine » (Minuit, 96 p., 11,50 euros) , voilà d'abord une phrase puis un avis, pêché sur http://www.politis.fr/Eugene-Savitzkaya-L-origine-du,30294.html

    « De porc à porcelaine, le fraudeur fou chemine autant dans le dictionnaire dont ses doigts rêches et gourds manipulent les pages que dans les prés à cochons de la Hesbaye ensoleillée… »

    On peut entendre ainsi ce que recouvre le mot « fraudeur »  : une figure strictement littéraire qui prend vie, se glisse dans la peau d’une personne, endosse l’existence du « fou » le temps du roman. C’est pourquoi la langue d’Eugène Savitzkaya apparaît aussi primitive, organique. Elle est un être de chair dont on sent battre le pouls, à fleur de peau. « La cyprine remonte au cerveau », lit-on dans le recueil de poèmes qui porte pour titre ce joli mot désignant les sécrétions vaginales dues à l’excitation sexuelle. C’est une juste métaphore de ce que produit cette œuvre sur le lecteur : un état de pure jouissance.

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    1. Le bonsoir caillardeuses gaillardes et gaillards caillardeux. De la poésie, crénom d'un bon diable ! Rémi tu as l'honneur du premier commentaire et c'est très bien. Et puisque le flamenco et l'Andalousie y sont abordés, je n'ai que ces modestes vers à proposer :

      Flamenco
      Dans l'aigu
      Ou dans le rauque
      Le flamenco est une plainte
      Qui se libère comme un roc
      Blessé
      Par de vieilles craintes

      Frontière sans frontières
      Il est la neige en feu
      Sur les remparts
      Ou à la lisière
      Libre
      Il se met aux aveux

      Lorsque son cœur est à l'ubac
      Son âme
      Repose à l'adret
      Un instant
      Le fouet claque
      Une lame se met à briller

      Nuit et jour
      La pierre des remords
      Efface ses larmes
      Nuit et jour
      La pierre des remords
      Allume son charme

      Entre deux soupirs
      Bien cambrés
      Au bout d'une plaine
      Desséchée
      Une voix anonyme timbre
      Un message d'éternité

      Ton lien au-dessus en clair : Eugène Savitzkaya : L’origine du monde
      La bonne soirée !

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  2. Merci de ton très beau poème Flamenco qui "claque" si fort qu'on croit entendre et les semelles des danseurs et la lame brillante... (je crois avoir déjà lu ce poème dans ton recueil d'il y a longtemps!)
    Merci du choix des illustrations et des liens, y compris celui du commentaire ci-dessus : j'ai découvert ce "fils de Michaux" (?) tout à l'heure, en attendant parution du billet !

    "Clown" a été écrit en 1939, l'année terrible de la défaite de la Révolution d'Espagne... Michaux avait à peine 40 ans et moi à peine quelques mois... Il a beau être né au 19°siècle (1899) il est "poète du 21°siècle", à mon avis...

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  3. Salut les poètes ! Quant à Erby, il a le sens de la "mesure".

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  4. Bonjour caillardeuses et caillardeux. Hommage à Eduardo Galeano, mort récemment : Les mots d’Eduardo Galeano déambulent dans les rues d’un continent. Plus un texte sur la Palestine publié en 2012 à Caracas. Mort également de Günter Grass qui pour son poème "Ce qui doit être dit" fut accusé d’antisémitisme et déclaré « persona non grata » en Israël. Günter, le poème et Israël

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    1. Merci pour le train de liens, dont dernier wagon accroché...
      Hélas, il s'agit de morts, ceux-là poètes et célèbres...
      Ces temps, les morts des boat-people en Méditerranée sont des centaines, d'inconnus, tous plus ou moins poètes, puisqu'à la recherche "déraisonnable" (dixit les cravatés de la Commission de Bruxelles) de vivre dignement...
      Paix sur eux,
      c'est à dire continuons à être déraisonnables, poètes et rebelles à la "bien-pensance" de la dictature du FRIC...

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  5. Je n'ai jamais compris comment on pouvait lire plus de trois ou quatre "vers" de Michaux sans éclater de rire. Mais bon : c'est chacun son goût, comme dirait l'autre. Y en a bien qui lisent Saint-John Perse, alors…

    La bonne nouvelle, c'est que les rangs de la gauche antisémite se clairsèment sérieusement, ces temps derniers !

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  6. Salut tout le monde ! Merci pour ce moment de poésie ! Cela fait du bien à l'âme... surtout que l'actualité est toujours pourrie (j'ai parcourue quelques titres et j'ai déjà overdose...) Très beaux poèmes en partage :-)

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    1. Merci de ta visite et de tes goûts pour la poésie !

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  7. Cher Rémichhhh vos mots savent servir la poésie
    La poésie savent aussi servir vos mots
    En tous les cas elle sert nos maux
    Comme tous les arts servent la vie

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